La société civile africaine se rebelle contre l’accord de libre-échange UE-Afrique

26 novembre 2014

Article publié sur Médiapart le 20 novembre 2014 | Par Fanny Pigeaud
Après douze années de bataille, la Commission européenne a fait signer aux pays africains un accord de libre-échange qui leur est très défavorable. Sur place, des organisations de la société civile se mobilisent pour demander aux parlements nationaux de refuser sa ratification.

La nouvelle est passée inaperçue en Europe, et pourtant, le commissaire européen au commerce, Karel De Gucht, a dû jubiler ce jour-là : le 16 octobre, cinq pays d’Afrique de l’Est ont signé avec l’Union européenne (UE) un accord de partenariat économique (APE). Quelques mois plus tôt, c’était toute l’Afrique de l’Ouest et plusieurs États d’Afrique australe qui disaient oui à l’UE. L’événement a été à la mesure des efforts déployés par la Commission européenne : elle a bataillé pendant douze ans pour faire accepter cet accord de libre-échange. Sauf que… ce n’est peut-être pas terminé ! En Afrique, des organisations de la société civile se mobilisent depuis plusieurs semaines pour demander aux parlements nationaux de refuser la ratification de ces APE, ultime étape avant leur mise en œuvre.

Chefs d’entreprise, ONG, hommes politiques, économistes, monde paysan : beaucoup ont été en effet consternés par la signature des APE. « Trahison », « suicide », « mise à mort », « erreur historique », entend-on ainsi en Afrique de l’Ouest. Pour ceux qui ont suivi l’histoire des APE depuis le début, rien de surprenant : tout au long du processus de négociation entre Européens et Africains, les tensions ont été fortes.

Au départ, il s’agissait de trouver une solution pour remplacer la convention de Lomé et les accords de Cotonou. Ces derniers permettaient depuis 1975 à certains produits des pays ACP (Afrique Caraïbes Pacifique) d’entrer sans taxe en Europe, prenant ainsi en compte les différences de développement entre les deux zones. Mais parce que non réciproques et discriminatoires, Lomé et Cotonou ont été jugés non conformes aux règles de l’Organisation mondiale du commerce (OMC). En 2002, la Commission européenne a donc proposé de nouveaux accords à signer avec six blocs (Afrique orientale, Afrique australe, Afrique de l’Ouest, Afrique centrale, région des Caraïbes et région Pacifique).

L’idée principale de ces APE, qui vont bien au-delà des demandes de l’OMC, peut se résumer en une phrase : « On permet à 100 % de vos produits d’entrer sans droits de douane en Europe et vous faites la même chose pour au moins 80 % des nôtres. » Très tôt, les régions Caraïbes et Pacifique ont accepté le deal. Pour les autres, il a été pendant longtemps hors de question d’y adhérer. D’ailleurs, l’Afrique centrale, le Cameroun excepté, résiste encore. Et pour cause : toutes les études indiquent que l’ouverture des marchés aux produits européens va plomber les économies africaines, très vulnérables.

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